LA TRAHISON DES ÉLITES DU NORD CONTRE LEUR PEUPLES
En Juillet 2018, le monde entier découvre une vidéo, l’horreur. Des images insoutenables de soldats exécutant des femmes et enfants, on y voit des hommes en uniforme entraînant en brousse des femmes et des enfants, deux femmes, l’une tenant un enfant par la main, l’autre portant un bébé sur le dos et juste derrière elles, les forçant à avancer, deux hommes en uniforme de l’armée… « Lève la calebasse qu’on te voit bien, toi, Boko Haram, tu vas mourir », après ces propos les deux femmes et enfants recevront 17 balles de fusil dans la tête.
Cette
scène se déroule au Cameroun, dans la région de l’extrême Nord.
Ce
soir, une élite du grand nord, ministre de la communication avait organisé une
conférence de presse indiquant qu’il s’agissait d’un fake News. Il maintiendra
ses propos jusqu’au jour où, sous la mobilisation de communauté internationale
grâce à la pression de Amnesty Internationale l’armée camerounaise finira par
identifier les soldats assassins.
Pas
une seule élite du grand nord ne s’est prononcée pour dénoncer cet acte de
barbarie contre des femmes et filles ressortissantes de cette région. Même pas
les ministres et hauts cadres et députés de sexe féminin originaires du grand
Nord.
Sous-scolarisation,
obscurantisme, misère et pauvreté, tels sont en quelques mots les qualificatifs
que l’on peut donner aux populations de cette partie du pays victimes du
système féodale en cours.
Comme
dans l’Europe médiévale que Attali décrie dans son livre de 1492 « Dans
le peuple, le rapport à la souffrance n’a guère changé depuis que le
christianisme lui a confère un sens mystique : Abandonné aux savoirs les plus
anciens le paysan se fie toujours plus au sorcier et au guérisseur qu’au
policier ou au prêtre. Partout en Europe le sorcier est à la fois vénéré et
craint, on se répète avec effroi des sombres histoires des vieilles femmes
capables de se transformer en chouettes pour venir sucer le sang des enfants ou
de sorciers mangeurs de cadavres ».
Au
moment où nous lisons ses lignes écrites par Jacques Attali , on se croirait au
Nord Cameroun alors qu’on est au 21 e siècle avec le système féodale.
Toutes
les sociétés humaines se distinguent généralement par la manière dont leurs
élites se conduisent à l’endroit des populations, conduisent la vie dans la
cité, et plus particulièrement par le traitement quelles réservent aux couches
les plus modestes.
Dans
les sociétés avancées on observe que les élites tirent les populations vers le
haut, en créant des passerelles susceptibles de multiplier les opportunités
d’éducation et de promotion sociale. Elles lui inculquent des valeurs d’audace
et d’entreprenariat, par opposition à celle de résignation et de fatalisme,
caractéristiques des sociétés fermées.
En
effet, dans les sociétés fermées, au contraire des sociétés avancées, les
élites cherchent à maintenir les couches les plus démunies dans le statu quo.
Ainsi,
plus d’un million de personnes se trouvent au bord du gouffre de
l’anéantissement par la faim dans les régions du grand nord ,abandonnées dans
l’extrême pauvreté et l’obscurantisme culturel, faisant de ces zones des
espaces propices au recrutement des djihadistes par la secte terroriste Boko
Haram.
Selon
les chiffres rendus public par le ministère de la santé publique, l’on dénombre
55 cas de choléra dans le grand nord Cameroun, avec 35 % de la population de
moins de 12 ans vivant sans état civil , c’est-à-dire non identifié par l’état
du Cameroun. Les trois régions les plus touchées par l’insécurité alimentaire
au Cameroun sont respectivement la région Région de l’Extrême-Nord 35 %, la
Région d’Adamaoua 18 % et la Région du Nord avec 10%.
L’institut
national des statistiques révèle que 65 % de la population du grand nord
Cameroun vit dans la pauvreté avec un taux de chômage de 70 %, 70 % de jeunes
sont accros à la drogue dure, le Tramol.
D’une
superficie de 36000 km2, plus vaste que la Belgique et Israël, le Lamida Rey
Bouba est un territoire dans le nord Cameroun dirigé par le Lamido souverain
Aboubakary Abdoulaye, dans les conditions de féodalité extrêmes où le roi règne
tel un monarque absolu disposant des pouvoir les plus étendus sur ses sujets au
point où l’on se demande si on est toujours en république du Cameroun .
Selon
le Réseau des défenseurs des droits de l’Homme en Afrique centrale (Redhac), le
Lamido de Rey Bouba fait régner la terreur parmi les populations,
«Ce
chef traditionnel entretient sa garde personnelle, ses prisons privées, fait
lever l’impôt pour l’entretien de son harem et de sa cour sous la barbe du
préfet et du sous-préfet qui sont eux-mêmes sous la botte de ce monarque des
tropiques.» précise le Rhedac.
Toutes
les régions du grand nord du Cameroun sont à des variantes prêtes à l’image de
Rey Bouba. Et pour le découvrir il suffirait de s’y rendre pour constater qu’en
2018, des camerounais sont réduits toute leur vie à s’asseoir à même le sol en
signe de soumission totale à leur souverain.
Pour
faire admettre aux populations cet état, l’Elite la leurs présente comme une
volonté divine.
Toute
personne visitant le grand nord Cameroun est surprise par l’immense potentiel
de ces régions le niveau de misère et d’abandon des populations sous le règne
de l’obscurantisme absolu.
Les
élites de l’extrême nord ne se soucient guère du sort des populations, bien au
contraire, elles les utilisent comme du bétail électoral pour s’attirer les
bonnes grâces du régime du président Biya. En effet, utilisant ce ‘’bétail
électoral’’, ces élites contribuent à assurer de la victoire du président Paul
Biya aux différentes élections et par la suite rédige les mémorandums au nom
des populations ainsi abusées pour revendiquer des postes dans
l’administration.
Il
existe clairement une conspiration du silence contre les populations entre les
élites du septentrion les chefs traditionnels de ces régions et le régime Biya.
A ce
propos, voici ce que dit le Rhedac « Durant les périodes des élections, les
bureaux de vote sont placés sous le contrôle des hommes de main du lamido.
Ceux-ci s’assurent que les électeurs votent selon les consignes du monarque, en
effet, les citoyens ramènent les bulletins des autres candidats afin de prouver
l’authenticité de leur vote’ ».
Hamadjoda
Adjoudji vétérinaire de formation et originaire de Banyo, a passé plus de 20
ans, de 1984 à 2004 ministre de l’élevage de la pêche et des industries
animales, c’est 10 ans après son départ de ce ministère que la région du grand
nord réputé pour l’élevage bovine a eu sa première unité de transformation de
Bétail. Décédé en Novembre 2018, il ne retournait à Banyo que pour son Ranch ou
lors des élections, ce qui lui valut le maintien des privilèges au sein du
régime. Président du conseil d’administration de l’ARMP cumulativement avec
celui de l’université de Ngaounderé. Aucun lien avec les populations de sa
région sauf à les considérer comme du bétail électoral, il sera inhumé dans un
cimetière non loin de Yaoundé.
Certains
l’accusent même d’avoir détourné des projets de développement rural au profit
de son ranch. Toujours le même schéma d’abus des populations, le plus étonnant
est sa longévité au pouvoir qui confirme bien la thèse d’une entente tacite
avec le régime Biya.
Ahmadjoda
Adjoudi ,Talba Mallah, Issa Tchiroma Bakary, Ayang Luc,Cavaye Yeguie Djibril,
Mounouna Foutsou,Mohamadou Sali, Bello Bouba Maigari,Ahmadou Ali,Zachari
Perevet,Abdoulaye Yaouba,Yao Aissatou,Ousmanou Moussa, Kalkabar Malboum,Ousman
Mey,etc… Toutes ces élites du grand nord jouent la même partition, en
s’attelant à maintenir les populations dans cet obscurantisme, considérant leur
émancipation comme une menace à leur privilèges. Qu’elles soient politiques,
administratives, économiques, intellectuelles, ces élites toutes mouillent le
maillot pendant les élections pour le maintien du régime Biya, dans la
perspective du maintien du statut quo.
Ce
système primitif de féodalité marqué par la perpétuation de l’ordre établi est
entretenu par ces élites au fil des C’est ainsi que les nouvelles générations
de manière surprenante visent à en assurer la relève, à l’instar des Modeste
Fopa Motouin des impôts, Guibai Gatama de l’œil du Sahel et bien d’autres.
Sur
ce registre, la plus grosse surprise lors de cette dernière élection
présidentielle aura été le jeune Directeur des Impôts Modeste Fopa Motouin que
l’on a vu descendre dans les villages de l’extrême nord battant campagne pour
le régime Biya alors que celui-ci n’avait rien apporté aux masses des
populations pauvres de cette contrée.
Ce
faisant, il militait contre le parti de Maurice Kamto le MRC, qui tout au long
du dernier mandat présidentiel et durant la campagne s’était tenu aux cotés des
populations qui rêvaient de changement et d’émancipation.
Non
seulement les militants de l’opposition étaient chassé des bureaux de votes,
plusieurs se sont vu dépossédés de leur terres par les différents chefs féodaux
locaux.
Aux
côtés de Modeste comme surprise, Guibai Gatama qui lui concentrait l’essentiel
de ses publications à promouvoir les actions du ministre de la communication
Issa Tchiroma, celui-là même qui au moment où le monde entier était écœuré face
à la monstruosité de certains soldats camerounais après l’assassinat des femmes
et bébé, multipliait des sorties pour nier les faits.
L’arrivée
du MRC, mouvement pour la renaissance du Cameroun et la prise de conscience de
certains jeunes dans la société civile du grand nord crée de plus en plus un
sentiment de révolution chez les mentalités des populations. En témoigne les
fortes mobilisations des populations pendant la campagne présidentielle malgré
les menaces et intimidations de la part des élites. La révolution des
mentalités des populations des régions du grand nord contre ces élites risque
être chaotique .Un phénomène révolutionnaire prend naissance dans le grand nord
causé par la prise de conscience des populations, des abus qui ont été commis
par leurs élites. Le degré de vampirisme de ces élites vivant aux dépens de la
substance vitale des populations, leur niveau de monstruosité et de cynisme
face à leur souffrance fait redouter une implosion.
Au
21 e siècle, transformer un jeune en gardien des troupeaux ou une jeune fille
épouse forcée, domestiques, servante femme de ménage sans perspective
d’éducation relève de crime contre l’humanité alors qu’a contrario, instruit,
l’un comme l’autre pourrait deviendrait médecin, avocat, professeur,
journaliste. Suivant ainsi les traces de Cheik Modibo Diarra dont le destin
aurait pu être celui de berger au Mali mais qui deviendra un brillant
scientifique à la NASA.
Albin
Njilo
Laisser un commentaire